Le 10 mars dernier, suite à la requête du Comité Champagne et l’Institut National de l’Origine et de la Qualité, INAO (demande n° FR-2022-02678), l’Afnic a rendu une décision intéressante concernant le nom de domaine « champagne-co.fr » dans le cadre de la procédure extrajudiciaire de règlement des litiges « Syreli ». Comme cette dernière ne permet pas à plusieurs requérants d’engager une même action, le Comité Champagne a officiellement porté l’action, mais l’INAO est également cité dans la décision.
L’Afnic (Association Française pour le Nommage Internet en Coopération) est une association à but non lucratif en charge de la gestion du registre des noms de domaine en France (plus de 3,7 millions de noms de domaine en « .fr ») « .fr » est le « country code top level domain » (ccTLD) relatif à la France. Afin de régler les litiges concernant l’attribution d’un nom de domaine de deuxième niveau dans le « .fr », et obtenir le cas échéant la récupération ou la suppression de celui-ci, l’Afnic met à la disposition de toute personne physique ou morale deux procédures extrajudiciaires :
- Les dispositions de la procédure Syreli, mise en place exclusivement par l’Afnic. Dans ce cadre, les décisions sont rendues par un collège de l’association même ;
- Les dispositions du Règlement Parl (procédures alternatives de résolution des litiges), mise en place par l’Afnic en collaboration avec l‘Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Dans le cadre de cette procédure, les décisions sont rendues par des experts sélectionnés par l’Afnic et par l’OMPI.
Ces procédures sont disponibles pour toute personne physique ou morale estimant qu’un nom de domaine enregistré dans le « .fr » entre dans l’un des cas prévus à l’article L.45-2 du code des postes et des communications électroniques, à savoir :
i. Susceptible de porter atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ou à des droits garantis par la Constitution ou par la loi ;
ii. Susceptible de porter atteinte à des droits de propriété intellectuelle ou de la personnalité, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi ;
iii. Identique ou apparenté à celui de la République française, d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales ou d’une institution ou service public national ou local, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi.
En ce qui concerne le nom de domaine « champagne-co.fr » dans le cadre de la procédure Syreli, le collège Afnic a considéré que le Comité Champagne, ainsi que l’INAO, avaient un intérêt à agir. De même, conformément à la jurisprudence, le collège a considéré que l’appellation d’origine contrôlée ou protégée en tant que signe distinctif peut bénéficier d’une protection contre les atteintes dont il fait l’objet dès lors que le requérant justifie : Des droits de défense et de gestion de l’appellation d’origine (AOC et AOP), de la similarité entre les signes et de l’usage privatif par le titulaire du nom de domaine privant les ayants-droit de l’appellation d’origine de toute utilisation légitime et/ou d’une utilisation susceptible de détourner ou d’affaiblir la notoriété de l’appellation d’origine. En conclusion, le collège a considéré que l’enregistrement du nom de domaine en question pouvait constituer un détournement illicite et un affaiblissement de la notoriété de l’appellation d’origine « Champagne ». Le collège a donc conclu que le titulaire du nom de domaine ne pouvait ignorer l’existence de l’appellation d’origine contrôlée et protégée « Champagne » et que celui-ci était susceptible de porter atteinte à un droit garanti par la loi, et notamment celui régi par les articles L. 115-1 et s. du code de la consommation (auquel renvoie l’article L. 721-1 du Code de la propriété intellectuelle) et l’article 103 § 2 du Règlement (UE) 1308/2013 du 17 décembre 2013. Ainsi, le collège a décidé d’accepter la demande de suppression de « champagne-co.fr ».
Le texte complet de la décision du collège Afnic est disponible ici (il s’agit de la première procédure Syreli introduite par le Comité Champagne pour supprimer un nom de domaine). Par ailleurs, ce dernier avait déjà utilisé le Règlement PARL dès 2005 (voir décision sur le litige concernant le nom de domaine « champagnes.fr », disponible ici).
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